mardi 3 octobre 2023
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Les forces de l'ordre veillent au respect des rangs

ANALYSE : quand un appel à candidature met à nu la précarité de la jeunesse Burkinabé

 

Recrutement de 2 500 opérateurs de kits par la CENI

Quid de l’immense foule de jeunes  au stade du 04 Août les 10 et 11 avril ?

Les images n’ont pas eu la même attention que celles du congrès du MPP les 05 et 06 avril à Ouagadougou  et les images du meeting du Front républicain le 12 avril à Bobo-Dioulasso. Et pourtant, elles parlent plus que les deux meetings. Il s’agit des jeunes sortis spontanément à l’appel de la CENI pour le dépôt de leurs dossiers pour le recrutement de 2 500 opérateurs de Kits dans le cadre de l’enrôlement prévu à cet effet. Une immense foule de chômeurs déchaînée à l’occasion plus que des militants galvanisés de n’importe quel parti politique en meeting. A un peu plus d’un an de la fin du mandat du seul président au pouvoir depuis plus d’un quart de siècle, seul président qu’ont connu la plupart de ces chômeurs et des jeunes burkinabè, il est très problématique que l’avenir de la jeunesse soit si sombre et, incertain. Pendant ce temps, des acteurs politiques s’échinent à trouver les voies et moyens permettant à Blaise Compaoré pouvoir briguer un autre mandat. Cette armée de jeunes chômeurs peut-elle se sentir concerner par un possible référendum sur l’article 37 au Burkina ?

Dans tous les pays du monde où la gouvernance vise le mieux-être des populations, les questions d’emploi de la jeunesse sont  sujettes à cauchemar  pour les dirigeants imbus de leur responsabilité publique. Le procès fait le plus souvent à l’endroit des pouvoirs publics africains en général, c’est de ne pas se préoccuper du sort du peuple souverain qui végète misérablement le plus souvent là où l’opulence insultante des dirigeants s’affiche sans morale. Au regard de la situation de la jeunesse désœuvrée, l’on se demande si le Burkina ne s’est pas construit le statut d’une poudrière. Pour n’avoir pas su engager et adopter de véritables politiques sociales qui anticipent sur les problèmes d’emploi des jeunes. Les jeunes qui ont pris d’assaut le stade du 04 Août pour  postuler à l’avis de recrutement de la CENI espèrent tous  un emploi de 02 à 03 mois, pas plus ! Des  chômeurs et des étudiants spontanément sortis de leur logis pour espérer se faire recruter, avoir un peu d’argent et soulager leur grande  précarité. Cette situation passée presqu’inaperçue mérite qu’on s’y attarde au regard des discours politiques contradictoires sur la situation du pays. Le front républicain partisan d’un référendum sur l’article 37, de la mise en place du sénat et l’opposition politique qui n’en veut pas depuis les premières idées de réformes politiques.

Que peut bien signifier un référendum pour une armée de jeunes chômeurs tenaillés par la nécessité de la vie ? Une imposture historique à leur égard peut-être dans la mesure où le référendum vise le maintien au pouvoir d’un président dont le système de gouvernance produit plus de chômeurs que de travailleurs parmi les étudiants. Aucun pouvoir politique ne s’accommode des images insoutenables de  jeunes obligés d’aller dormir au stade pour espérer réussir le dépôt de dossier leur permettant d’être retenus  par la CENI. Pour ces jeunes, c’est un projet « HIMO » surprise ! Sauf qu’ici il ne s’agit pas de haute intensité de main d’œuvre, mais de travail technique et intellectuel.

Les chiffres officiels d’il y a environ deux ans  renseignent que 51% des jeunes de moins de 30 ans sont sans emploi,  45% des demandeurs d’emploi ont un niveau secondaire et 20% le niveau supérieur.

 La situation particulière du monde estudiantin est singulièrement dégradée, elle pourrait mériter la création par le gouvernement d’un projet permettant  aux  étudiants en quête d’emploi de s’occuper, même momentanément avec du travail même peu durable comme le projet HIMO pour les jeunes sans qualification. A défaut de pouvoir créer des emplois dignes de ce nom pour ces valets du temple du savoir. Visiblement l’augmentation du nombre de bourses   de 1000 à 2000 reste insignifiante par rapport aux effectifs estudiantins  au Burkina. Le programme spécial de création d’emploi (PSCE) lancé en grande pompe en 2012 pour  faciliter l’accès des jeunes à l’emploi n’a pas pu consoler les jeunes, toutes qualifications confondues, dans leur chômage comme ils l’ont espéré. Le PSCE devrait prendre fin en 2014 alors que le taux de chômage des jeunes prend de l’envol d’année en année.

La monstre mobilisation de jeunes chômeurs les 10 et 11 avril  pour  2 à 3 mois de travail de la CENI vient rappeler l’échec du système de gouvernance au Burkina en matière de création d’emplois. Certes, le nombre de diplômés croit d’année en année, mais les efforts fournis par le gouvernement ne semblent pas être à la mesure du drame que représente la jeunesse désœuvrée en nombre croissant. Les chiffres officiels d’il y a environ deux ans  renseignent que 51% des jeunes de moins de 30 ans sont sans emploi,  45% des demandeurs d’emploi ont un niveau secondaire et 20% le niveau supérieur.

S’il est vrai que les jeunes sont l’avenir d’un pays, il reste à prouver si les dirigeants burkinabè mesurent la portée d’une telle lapalissade dans le cas des étudiants diplômés qui chôment durement.

En attendant des statistiques plus actuelles en la matière, le phénomène de chômage chez les jeunes, particulièrement les étudiants interpelle les autorités nationales sur l’urgence d’opérer des réformes structurelles plus profondes en matière de gouvernance. Ne serait-ce que pour « pacifier » le pôle universitaire en attendant d’endiguer au mieux le phénomène du chômage des jeunes.  La grande aberration qui pourrait révolter la jeunesse, estudiantine notamment,  c’est bien le manque d’intérêt apparent que l’autorité affiche face au sort des jeunes. Chaque semaine vient avec son lot de jeunes voleurs, brigands que la police ou la gendarmerie présente à la télé avec leurs butins arrachés aux populations !  Finis les états généraux de l’enseignement supérieur, mais le désordre reste apparent et en l’état, l’étudiant se clochardise et guette le moindre emploi précaire à la moindre annonce. Pendant ce temps, les sirènes politiques aux affaires ne jurent que par leur avenir politique et leurs ambitions. Elles sont prêtes à plonger ce pays dans un schéma d’instabilité au nom de leurs ambitions politiques et leurs intérêts égoïstes. S’il est vrai que les jeunes sont l’avenir d’un pays, il reste à prouver si les dirigeants burkinabè mesurent la portée d’une telle lapalissade dans le cas des étudiants diplômés qui chôment durement. Ce qui est intéressant, c’est que tout est dans le futur : et l’avenir des étudiants, et la possibilité de faire un référendum sur l’article 37 ou d’installer le sénat. Il n’est pas exclu que des pogroms éclatent si le futur politique doit faire l’impasse sur la majorité désœuvrée. La CENI a en tout cas réussi en l’espace d’une annonce son « HIMO estudiantin ». Le stade du 04 août était noir de monde les 10 et 11 avril derniers, venu pour chercher travail de 02 à 3 mois. Espérons que cette mobilisation monstre de chômeurs interpellera une fois encore le gouvernement, et que quelque chose sera fait incessamment. Autre que ces débauches d’énergie pour des projets politiques qui n’intéressent pratiquement pas les jeunes prisonniers de leur chômage. La grande foule de chômeurs sortis spontanément les 10 et 11 avril dernier au stade du 04 Août pour besoin de travail est aussi immense que chacune des foules du MMP et du front républicain. L’on doit savoir l’interpréter ! Sinon…

W. Frédéric OUEDRAOGO

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Un Commentaire

  1. Merci pour cette belle analyse.
    Un gouvernement qui ne dispose pas de véritable politique capable de résoudre le problème de l’emploi des jeunes doit forcément revoir sa copie.
    D’autre part il faut que la jeunesse elle même s’assume et qu’elle se fasse entendre pour revendiquer la place qui lui est due en participant à la vie politique. On a souvent l’impression que cette jeunesse ignore qu’elle constitue une grande force pouvant agir considérablement contre les dérives de nos dirigeants.
    Bonne réflexion.

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